Quelques clés de la Molette

Quelques clés de la Molette

Il est difficile aujourd’hui de trouver les moindres renseignements sur la Molette, ce ru qui courait (lentement !) au nord de la ville et qui faisait office de frontière entre Drancy et le Blanc-Mesnil.

as vraiment un fleuve. Ni même une rivière. Pourtant de nombreux Drancéens qui ont eut une dizaine d’années avant les années 60 vous en parleront, émus, comme d’un terrain de jeux extraordinaire. Peut-être parce que, depuis, l’eau ne coule plus sous les ponts…

Il prenait sa source à Rosny-sous-Bois, même si le terme « source » n’est pas franchement approprié : depuis le début du siècle, la Molette ne recevait plus que les eaux de ruissellement et de quelques égouts… Et si le sens de son écoulement est une survivance de ces bras de la Marne qui, il y a des milliers d’années, avaient envahi toute la région, il faudrait au moins remonter au XIXe siècle pour retrouver une Molette ressemblant à un ruisseau. Après Rosny-sous-Bois, il traversait Bondy, puis longeait Drancy, à l’extrémité du Village Parisien (l’avenue de la Molette, devenue aujourd’hui avenue des Martyrs de Chateaubriand, en témoigne), entrait sur le territoire de Blanc-Mesnil avant de retrouver Drancy au niveau du Chemin de fer. Il faisait alors presque le tour du quartier de l’Économie, avant de poursuivre sa route au Bourget, de frôler La Courneuve et Dugny et de se jeter dans le Rouillon.

Or, toutes ces municipalités ne roulaient pas sur l’or. Aussi, lorsqu’il était question de curer la Molette « à vif fond et à vieux bords », bien peu d’entre elles manifestaient un grand enthousiasme. Et pourtant, elle en avait bien besoin : sous à peine quelques centimètres d’eau, la vase s’accumulait. Ce curage posait d’autant plus de problèmes qu’il était à la charge des riverains. En 1920, il en coûtait 50 centimes par mètre de rive, dont un tiers était pris en charge par le département. Or, les habitants du quartier de l’Économie, qui avaient « hérité » de la plus importante partie de la Molette drancéenne, n’étaient pas spécialement fortunés. Sans doute se seraient-ils bien volontiers passés de ce ru qui débordait assez souvent, pour peu qu’il pleuve un peu trop, ou que, comme en avril 1931, le canal de l’Ourcq, qui passait au-dessus de la Molette, se déverse dans son lit lors d’un accident durant des travaux. Le quartier se retrouvait alors les pieds dans l’eau, se rappelant au bon souvenir des noms des deux lieux-dits qui le compose : le Marais et la Mare Cassine. Si ces inondations pouvaient avoir un quelconque intérêt pour les cultivateurs du XIXe siècle, il n’en était pas de même pour les ouvriers qui s’installaient à Drancy.

En fait, depuis les années 30, les travaux en cours dans toute cette région qui se développait très rapidement avaient été fatals à un bon nombre de ces petits cours d’eau. Les lois Strauss (1924) et Sarraut (1928) imposaient une mise en conformité de l’assainissement. On commença à créer des égouts où se déversaient les eaux d’écoulement, privant encore un peu plus la Molette de son eau. C’est pourquoi, très lentement, elle finit par disparaître. Seul subsistait son lit qui devait tout de même se remplir les jours de pluies. On comprend alors pourquoi, bien après la guerre, les gamins allaient encore y pêcher des têtards.

Depuis, il ne reste plus rien. Néanmoins, si quatre bassins de rétention sont implantés sur Drancy et que le dernier se situe sous le stade Jorissen, à l’angle de la rue du Bois de Groslay et de l’ancienne rue de la Molette, il ne faut pas y voir un hasard. Si ce petit cours d’eau s’est estompé doucement en traversant le siècle, il est essentiel de juguler encore aujourd’hui les risques d’inondations.

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